Parce que voyez-vous, se battre jusqu’au bout, endurer les pires souffrances (avec une aide médicale ou sans) tenir le coup jusqu’au dernier souffle, c’est indigne. Voilà. Voilà où on en est.Mais qui a dit le contraire ? Vous avez le droit de croire à la vertu rédemptrice de la souffrance, ou au combat acharné pour la survie, ou à tout ce que vous voudrez. Simplement n'obligez pas les autres à adopter votre croyance et à faire comme vous vous feriez à leur place (ou prétendez le faire, parce que c'est assez facile à dire quand tout va bien pour vous).
Quant à l'argument de la "dignité", j'ai relevé à plusieurs reprises qu'on peut lui faire dire ce que l'on veut, dans un sens comme dans l'autre (et les protagonistes ne s'en privent pas). Un tel argument doit être rejeté en droit en faveur du principe de non agression.
Définissez agression ?C'est le fait de s'en prendre directement à l'intégrité physique de quelqu'un ou à sa propriété. Ce qui n'est pas le cas du suicide assisté : on n'injecte pas un produit létal au patient, c'est lui qui prend volontairement 15 grammes de natrium pentobarbital (barbiturique mortel). Le caractère volontaire de la mort est bien clair, alors qu'il deviendrait contestable s'il y avait une action potentiellement agressive de la part d'un tiers (par exemple l'injection d'un produit).
Il ne s'agit pas ici d'euthanasie active (du genre "débrancher le tuyau"), ce qui est un autre problème. Il s'agit du cas plus simple d'une décision que l'intéressé prend seul.
Ben non, il y va pas tout seul, justement. Sinon, ce serait vraiment un suicide.Ah bon, parce que pour se suicider il faut être tout seul et n'avoir personne autour de soi, sinon ce n'est pas un suicide ? Revoyez vos classiques : la mort de Socrate, la mort de Sénèque, etc. Celui qui a fourni la ciguë à Socrate était-il un meurtrier ?
Comme cette pauvre femme atteinte d’un cancer des sinus qui me casse royalement les couilles à réclamer à partir dignement en exhibant ses tumeurs devant toutes les caméras de France, alors qu’elle peut encore se flinguer.Là je suis d'accord, d'ailleurs elle peut aller en Suisse pour un suicide assisté comme l'a fait Maïa Simon l'an dernier. En revanche, ça montre qu'on est moins libre en France qu'en Suisse (mais ce n'est pas nouveau).
Ainsi on réclame plus de lois afin d’être plus libre vis à vis de l’Etat.Un libertarien ne réclame jamais plus de lois, il réclame l'abolition de toutes les lois liberticides. En France, on ne sait pas faire autre chose que rajouter des lois, des exceptions, puis des exceptions aux exceptions. Et les associations qui militent pour le suicide assisté ont le tort d'entrer dans ce jeu-là.
La seule objection qu'on pourrait tenter de faire en droit contre le suicide assisté est la non assistance à personne en danger. Mais justement cet argument est rejeté par les libertariens (car il crée une obligation positive) et de plus il ne tient pas en face du consentement du patient.
Bref, la critique d'Ilys est non objective, apparemment fondée sur des motifs religieux. Elle cherche à imposer une éthique particulière sans se soucier du principe du consentement, comme le fait l'Etat ordinairement. Son éthique constitue une opinion tout à fait respectable, tant qu'elle ne prétend pas à l'universalité et ne devient pas normative. On pourrait développer une éthique de la pitié entièrement opposée, sur des motifs également religieux tout aussi respectables. Je ne le ferai pas parce que ça sort du cadre de ce blog.
Tiens, je vais faire une prédiction facile. Le prochain argument des opposants au suicide assisté sera : "vous faites la promotion d'une culture de mort". Culture de mort, il y a un moment qu'on n'a pas vu fleurir ce bel argument, du même niveau que celui des collectivistes qui parlent de "darwinisme social" au sujet du libéralisme.
13 commentaires:
Où avez-vous pris que Socrate se soit suicidé ? C'est la cité qui l'a condamné à boire la ciguë (et lui qui a refusé de prendre le large certes).
Pour le reste, c'est quand même curieux cette furieuse "envie de pénal" sur un blog libertarien...
Socrate avait la possibilité de s'enfuir et ne l'a pas choisie par respect des "lois de la cité". On est exactement dans le cadre du suicide assisté, c'est bien pour ça que j'ai pris cet exemple. La motivation du suicide n'entre pas en ligne de compte ici.
Sur l'envie du pénal, apparemment vous mélangez tout. Il serait de temps de relire Muray pour bien comprendre ce qu'il entendait par là. Il ne s'agit pas de combler un vide juridique, il s'agit de laisser les gens exercer leur liberté.
Je ne comprends décidément pas vos raisonnements : Socrate a bu la ciguë, alors qu'il aurait pu s'enfuir, donc il s'agit d'un "suicide assisté" ? (Peut-être faut-il préciser que l'absorption de la ciguë correspondait en l'espèce au procédé d'exécution, ce n'est nullement une forme de mort plus douce qu'aurait choisie Socrate pour se dérober à un mode d'exécution plus violent tout en se soumettant en esprit à la sentence).
Je ne crois pas trahir Muray en évoquant l'envie de pénal : cette dame a toute latitude de ses donner la mort comme elle l'entend (et même de "faire la fête" avant), mais ce qu'elle veut c'est une bonne loi qui institue, comme l'écrit excellemment un contributeur d'ILYS, un "service public" du suicide avec démarches administratives idoines.
Vous ergotez inutilement : quand on peut échapper à la mort et qu'on ne le fait pas, cela s'appelle aussi un suicide. Selon le dictionnaire : "acte qui cause, entraîne la mort de son auteur".
Sinon, relisez-moi : je n'ai jamais soutenu qu'il fallait de nouvelles lois, et je n'évoque le cas de la dame que vous citez que pour soutenir l'idée de suicide assisté, qui est pénalisé en France. Donc ce n'est pas une "envie du pénal", c'est au contraire une dépénalisation que je demande.
Socrate, cicéron, Sénéque, etc., se sont suicidés dans la mesure où ils auraient pu échapper à la mort.
Sénèque était partisan du fait "qu'il fallait vivre ce que l'on doit et non ce que l'on peut".
Laure, votre article n'a pas été compris.
Ilys est un blog sympa que je lis quotidiennement. Leur liberté de ton me fait souvent sourire.
Ils semblent un peu jeunes et plus proches du pamphlet que de l'analyse.
A priori, Il Sorpasso malgré ses dénégations est d'accord avec vous. Je ne saisis donc pas les raisons de cette polémique.
Quant à moi, je vous applaudis des deux mains. Moins de lois et plus de liberté voilà ce qu'il faut.
Pour le reste, cette dame que je plains sincèrement, nous fait part d'un non-événement qui n'aurait pas du dépasser trois lignes dans le journal local.
La profession que j'exerce me montre régulièrement que des gens réussissent leur suicide sans recourir à la presse et sans requérir l'aide de l'état. Je crois que cela ne leur viendrait pas à l'idée.
Le suicide est un acte intime. La souffrance due à un cancer devrait-elle nécessiter une prise en charge spécifique par rapport à la souffrance psychique ?
Enfin un qui me comprend ! (normal, c'est un psy, et comme il l'avoue lui-même dans son blog, il est très intelligent).
Le fait est que si je voulais me suicider, je n'aurais pas fait un tel tintamarre, je me serais débrouillée seule ou je serais allée en Suisse.
Ce qui m'intéressait, c'était d'examiner la question (est-il permis d'assister un suicidaire) d'un point de vue exclusivement libéral.
Ils sont encore petits, ils ne comprennent pas ! Tss, faut pas s'énerver pour cela !
Un suicide consiste d'après l'étymologie à se tuer soi-même (sui-cide). Je trouve la notion de "suicide assisté" comique, c'est ce qu'on appelle une oxymore.
A part ça, je ne suis pas favorable à une nouvelle loi, ni à une dépénalisation: je trouve la situation actuelle parfaite.
Un mourant en phase terminal, souvent cancéreux, se voit injecter des doses énormes de morphine et en quinze jours la question est réglée car la morphine à haute dose ne fait pas seulement taire la douleur, elle accélère le décès.
La femme dont il est question a refusé cette option pour des raisons qui la regardent. Elle a fait le choix de rester en vie et je ne comprends pas bien l'intérêt qu'on lui porte.
"Parce que voyez-vous, se battre jusqu’au bout, endurer les pires souffrances (avec une aide médicale ou sans) tenir le coup jusqu’au dernier souffle, c’est indigne."
Ah, oui, la dignité d'être enfermé dans un corps pourrissant sans aucun espoir, tel un animal pris dans un piège à loups attendant la fin de l'agonie dans l'angoisse et la souffrance. Je vois.
En ce qui me concerne, je rejette toute loi sur le sujet. Chaque décision que nous prenons nous amène toujours plus près de notre mort de toute façon, que ce soit la décision de fumer, de faire du parapente ou de monter par l'escalier.
S'approprier ce genre de décisions à la place de l'autre est le plus ignoble des vols, et ce que la décision aille dans un sens ou dans l'autre. C'est pourquoi je refuse que les hommes de main de l'état causent des ennuis à Mme Sébire, et que si celle-ci me demande de l'aide, je lui refuserai également.
@laure allibert
C'est vous qui ergotez bien inutilement sur un point qui n'est pas essentiel à votre sujet mais qui a son importance dans la tradition philosophique. Ni l'Antiquité ni l'histoire de la philosophie (jusqu'à votre intéressante contribution) n'avaient songé à tenir la mort de Socrate pour un suicide (c'est d'ailleurs dans le Phédon, en 62a, que Socrate condamne explicitement le suicide ; dans les dernières lignes, c'est bien l'esclave exécuteur des hautes œuvres qui apporte la ciguë). Comme votre obstination dans l'erreur ne m'a pas encore découragé et que je ne crois tout de même pas être en face d'un quelconque mal-comprenant sur un blog d'illettré, je vous soumets cette comparaison : il est notoire que Louis XVI a découragé les tentatives qui visaient à le faire sortir de la prison du Temple, doit-on dire que son exécution est un suicide ?
Pour le reste, j'aimerais savoir comment vous concevez cette "dépénalisation" ?
Apparemment vous saisissez mal le concept de consentement qui est central dans le libéralisme. Socrate a bien bu volontairement la ciguë. Cela n'a pas de sens (au moins vu de nos yeux aujourd'hui, et pas selon la mentalité antique) de "condamner quelqu'un à se suicider", car on ne peut pas obliger quelqu'un à agir volontairement contre son gré. Si on vous condamnait à vous suicider, le feriez-vous ? Si vous le faisiez, c'est que vous consentez à votre suicide ; si vous ne le faites pas, c'est que vous admettez qu'il s'agit d'une menace, d'une violence qu'on exerce sur vous.
Quant à la dépénalisation, il s'agit de dépénaliser l'assistance au suicide, dès lors que les critères de consentement sont clairement établis et validés.
Par ailleurs, je sais bien que ce n'est pas une preuve, mais si vous cherchez sur Google "suicide de Socrate" ou "Socrates' suicide" vous trouvez de nombreuses occurrences, bien plus que "meurtre de Socrate" ou
"Socrates' murder".
Du point de vue moderne, il s'agit bien d'un suicide, pas d'une exécution.
Je lis ici et là que cette dame aurait voulu l'aide de l'Etat pour une suicide qu'elle ne voulait pas assumer.
Accompagné le plus souvent de longues vaticinations sur la dépendance des individus à l'Etat ...
C'est d'une grande mauvaise fois, en l'occurence les defenseurs de l'euthanasie légale ne demande pas à l'Etat de les euthanasier mais à l'Etat de justemement ne pas intervenir.
Que croyez vous qu'il se passe si un médecin euthanasie un patient avec l'accord de ce dernier et que malgré tout une partie de la famille decide de porter plainte ? :
Proces evidemment et risque penal pour le médecin.
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